L’année 2025 marque un tournant discret mais décisif pour le tourisme marocain. Longtemps pensé comme un simple levier d’accompagnement de la croissance du secteur, l’investissement s’impose désormais comme un pilier structurant de la politique touristique nationale, au cœur d’une stratégie assumée de montée en gamme, de diversification de l’offre et de rééquilibrage territorial.
Les chiffres présentés lors du dernier conseil d’administration de la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT) confirment cette inflexion. Sur l’ensemble de l’année, l’investissement touristique s’est maintenu à un niveau élevé, atteignant 8 milliards de dirhams. Un volume significatif dans un secteur soumis à des cycles longs, à de fortes exigences capitalistiques et à des standards croissants en matière de qualité, de durabilité et de rentabilité. Il traduit, surtout, une confiance renouvelée des opérateurs dans la trajectoire du tourisme marocain.
Mais au-delà des montants, c’est la nature même de l’investissement qui évolue. La logique quantitative, longtemps centrée sur l’augmentation des capacités d’hébergement, cède progressivement la place à une approche plus qualitative. Montée en gamme, diversification des produits, meilleure intégration territoriale et création de valeur durable deviennent les nouveaux marqueurs d’un secteur en recomposition.
Une géographie des investissements en recomposition
Cette transformation se reflète dans la cartographie régionale des flux d’investissement. Casablanca-Settat capte 32 % des montants engagés, confirmant son statut de pôle économique majeur et de plateforme urbaine structurante. Marrakech-Safi suit avec 30 %, portée par une attractivité internationale solidement ancrée.
La région Rabat-Salé-Kénitra concentre désormais 15 % des investissements, tirée par l’arrivée de grandes enseignes hôtelières internationales et par un repositionnement progressif de la capitale sur les segments du tourisme d’affaires et du « city break ». Souss-Massa et Tanger-Tétouan-Al Hoceima enregistrent respectivement 13 % et près de 5 % des flux, tandis que les autres régions affichent une progression continue, signe d’un élargissement plus équilibré de l’investissement touristique à l’échelle nationale.
Modernisation et montée en gamme du parc existant
L’année 2025 aura également été marquée par un effort soutenu de modernisation du parc hôtelier existant. Plus de 69.000 lits ont été rénovés à fin 2025, dépassant l’objectif initial de 62.000. Des établissements emblématiques ont fait l’objet de rénovations profondes à Agadir, Marrakech, Rabat, Casablanca ou encore Ouarzazate.
Dans certaines destinations fragilisées, l’ingénierie touristique a joué un rôle déterminant. À Ouarzazate, plus de onze hôtels précédemment fermés ont ainsi été repris avec l’accompagnement de la SMIT, contribuant à la relance d’un tissu hôtelier longtemps en difficulté.
Parallèlement, la création de nouvelles capacités s’est poursuivie à un rythme soutenu : plus de 43.000 nouveaux lits ont été mis sur le marché, au-delà de l’objectif initial fixé à 40.000. Sur les cinq dernières années, près de 1.000 établissements ont vu le jour, portant la croissance du parc hôtelier national à plus de 14 %, avec une montée en gamme notable : 25 % d’établissements classés 3 étoiles, 18 % en 4 étoiles et 16 % en 5 étoiles.
L’hébergement haut de gamme représente désormais 53 % du parc classé et concentre une part significative des recettes touristiques. À cela s’ajoute un pipeline de près de 600.000 lits en cours de développement, offrant une visibilité de long terme au secteur.
L’animation touristique, nouveau levier de différenciation
Autre évolution majeure : l’investissement touristique ne se limite plus à l’hébergement. L’animation touristique s’impose comme un levier central de différenciation et d’allongement de la durée de séjour. En 2025, la SMIT a accompagné près de 1.500 projets à forte valeur ajoutée, couvrant des segments variés : tourisme de nature, loisirs expérientiels, éco-lodges, gastronomie, économie bleue, culture et divertissement.
Cette orientation répond à une demande internationale croissante pour des expériences immersives, authentiques et durables. Elle se matérialise par des projets structurants, comme la valorisation touristique de seize villages à fort potentiel ou le développement écotouristique des parcs nationaux d’Ifrane et du Toubkal, intégrant hébergements insolites, activités de pleine nature et animation éco-pédagogique.
Des résultats économiques qui confortent la stratégie
Sur le plan économique, les indicateurs confirment la pertinence de cette réorientation. Entre janvier et octobre 2025, les recettes touristiques ont atteint 113,26 milliards de dirhams, dépassant déjà le total enregistré sur l’ensemble de l’année 2024. Plus révélateur encore, les enquêtes montrent que le motif « découvrir le Maroc » arrive désormais en tête des raisons de visite, devant le critère climatique, signe d’une différenciation accrue de l’offre nationale.
Avec un record historique de 18 millions de touristes à fin novembre 2025 et une contribution du secteur portée à 7,3 % du PIB, l’investissement apparaît désormais comme le socle d’une transformation structurelle du tourisme marocain. Une mutation qui ambitionne d’inscrire durablement le Royaume parmi les grandes destinations mondiales, non plus seulement par ses volumes, mais par la qualité et la singularité de son offre.
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